«Secret d'un paysage »
Concerto de violon
Compositeur : Edith Lejet
Dédicataire : Hae-Sun Kang
Composition en 2012 – 2013
Durée : 12 mn
Commande : bénéficie d’une aide à la création d’une œuvre musicale originale de l’Etat (2013)
Création : Tokyo, Tsuda Hall, le 26 octobre 2013, sous la direction de Hiroaki Takaha, lors d’une soirée sur les Nouvelles orientales de Marguerite Yourcenar
Commentaire
Cette composition d’une douzaine de minutes, commandée par Laurent Teycheney pour l’Ensemble
Muromachi de Tokyo, s’adresse à la violoniste Hae-Sun Kang avec un environnement instrumental constitué de 17 musiciens de l’Ensemble Muromachi, certains jouant des instruments baroques européens, les autres des instruments traditionnels japonais.
Le choix des 17 instruments s’est fait à partir des ressources de cette formation originale, créée à Tokyo en 2007 par le claveciniste français Laurent Teycheney.
J’ai agencé le dispositif instrumental en quatre groupes : bois, percussions, cordes pincées, et cordes frottées.
En fait je n’ai introduit dans mon ensemble que quatre instruments typiquement japonais : le shinobue, le shakuhachi, le biwa et le koto, mon principal souhait étant d’obtenir au sein de chaque groupe une palette de timbres riche, substantielle et équilibrée dans tous les registres, du grave à l’aigu.
Le violon solo, seul instrument moderne, possède une sonorité plus ample que celle des violons baroques lui faisant écho, et déroule une partie expressive, mélodique et chantante dans un style souvent incantatoire.
A propos du titre
La contemplation de la nature n’est-elle pas un acte chargé de mystère ? Un paysage peut être considéré comme immuable si on se réfère au « temps des hommes » selon Messiaen. Il se caractérise par des formes, des couleurs et des contrastes. Mais nous ne le voyons que grâce à la lumière, qui, sans cesse changeante, en modifie constamment la perception. Parfois il est aussi soumis à la violence des éléments, qui peuvent altérer momentanément ses formes. Quelle est donc sa vérité ? Peut-être le peintre Wang, dont Marguerite Yourcenar nous conte l’histoire, a-t-il atteint un degré de Sagesse lui permettant de percer le secret d’un paysage !
A propos de la forme
Dès les premières mesures, des sons se répètent, s’associent, des gestes donnent naissance à des éléments motiviques qui se dessinent progressivement en créant leur identité et devenant reconnaissables, soit par leurs contours, soit par leur allure rythmique. Ces éléments traversent toute l’oeuvre d’une manière persistante bien qu’en perpétuelle mutation, et en assurent la charpente. Dans une logique de type onirique, ces motifs vont et viennent de façon apparemment imprévisible et fantaisiste, tout en engendrant de nouveaux motifs qui à leur tour se reproduisent, s’inscrivent dans la mémoire et cheminent à l’identique.
L’œuvre, qui part d’une note grave et résonnante des cordes pincées, et se termine dans l’aigu par un son de violon en extinction, se déroule en plusieurs grandes sections indiquées par le mouvement métronomique : noire à 56, puis « piu mosso » à 63, ensuite à 69, avant de revenir pour l’épisode final à 56. Cependant ce n’est pas une musique fortement pulsée. A l’intérieur de ces sections, on peut noter des séquences. En général un élan ascendant sert de signal au passage vers la séquence suivante.
L’œuvre évolue graduellement vers un point culminant, d’où la tension redescendra assez rapidement, tandis qu’on se dirigera vers une conclusion paisible aboutissant à une tenue sur un Si b aigu, que seul le violon solo maintiendra à la fin de l’oeuvre. On peut y voir une réminiscence du Si b insistant de registre variable entendu dès le commencement du chant de violon au début de la pièce.
Edith Lejet
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